Texte biographique : Alain Glayroux
Élie-Henri-Raoul Masset est né le 18 novembre 1897 à Agen. Élie est le fils de Paul-Jean-Antoine Masset, menuisier, et de Thérèse Gardènes.
Le 19 janvier 1927 Élie Masset épouse à Tonneins Madeleine-Jeanne-Cyprienne Flouret, cigarière. Madeleine Flouret est la fille de Jacques-Cyprien-Germain Flouret, épicier, et d’Élisabeth Rastié.
Quand Élie Masset est aux armées il est charcutier de profession. Après la Première Guerre Mondiale Élie part pour la campagne du Levant.Le Levant désignait traditionnellement en français les pays bordant la côte orientale de la mer Méditérranée que nous désignons à l’heure actuelle « de Proche Orient ».
En janvier 1921, pendant la bataille d’Aintab en Turquie, Élie reçoit en pleine face une balle explosive, qui génère une énorme blessure : défiguration, perte de toutes les dents, cicatrice faciale, déformation de la narine, destruction de la voûte du palais etc.
Après de longs mois d’hospitalisation Élie peut bénéficier d’un emploi réservé et après un séjour à la Manufacture des Tabacs de Paris, Élie termine sa carrière comme agent de maîtrise à celle de Tonneins.
Élie sera décoré de la médaille militaire et dans les années 1950 il se verra décerner la légion d’honneur.
Nous retrouvons Élie président de l’Amicale laïque de Tonneins de 1935 à 1968. Cette association a été fondée le 12 février 1898, ce qui fait d’elle une des plus anciennes de Tonneins. En parcourant les différents registres nous avons relevé plusieurs aspects de la vie de cette institution.
Le fil rouge de cette vieille Dame est la défense de l’École Laïque. Ce qui n’est pas du goût de nombreuses personnes en France et en premier lieu les partis conservateurs et les membres du Clergé.
Depuis sa fondation et durant des décennies ses détracteurs ne l’ont pas épargné au travers de différentes déclarations :
« …La loi scolaire enlève aux parents la liberté qui leur appartient, en même temps elle trompe l’intelligence des enfants, elle pervertit leur volonté, elle fausse leur conscience… Il faut chasser de nos écoles ces virus révolutionnaires qui font de la France un des pays de l’Univers civilisé où la plupart des générations qui adhèrent à l’âge d’homme sont systématiquement intoxiqués… ». 1925, Cardinaux et Archevêques de France.
Après la défaite en 1940, le Cardinal Gerlier, Primat des Gaules, écrit :
« … Victorieux, nous nous serions probablement emprisonnés dans nos erreurs, à force d’être laïcisée, la France risquait de mourir… ».
Nous avons fait le choix de ne retenir que ces deux diatribes, et de porter notre regard sur les différentes activités organisaient par les différents dirigeants de l’Amicale Laïque.
Nous retrouvons Élie qui préside l’association dans des périodes compliquées de notre histoire Française. Après avoir subi les affres de la Première Guerre Mondiale, Élie sera aux commandes de l’association pendant la dernière guerre mondiale pour arriver jusqu’aux évènements de Mai 1968.
Nous retrouvons très souvent dans les écrits des responsables et donc d’Élie des décisions collectives pour aider financièrement des élèves brillants, mais dont les familles étant dans le besoin ne peuvent pas payer le voyage à leur progéniture pour aller passer un concours, un examen etc.
Les responsables vont aussi développer des activités post et périscolaires en lien avec la solidarité et le social comme : la garderie, la bibliothèque, le sport et différentes disciplines, les cantines scolaires, les fêtes fédérales, des conférences, colonies de vacances, etc.
Nous ne pouvons détailler toutes les animations, tellement la liste est longue, sachant qu’un très grand nombre de celles-ci existent encore de nos jours, soit 120 ans après et toujours aux services des enfants et des familles.
Notre modeste étude ne serait pas complète si nous ne parlions pas des Cadets Tonneinquais ou « Pompons Rouges ».
Beaucoup de nos lecteurs ou de nos concitoyens plus jeunes, ignorent l’existence de cette harmonie musicale aujourd’hui disparue.
Devant l’engouement de l’harmonie, dont les musiciens étaient de plus en plus demandés, Élie et le Conseil d’Administration décidèrent de créer le 13 mai 1942 une « batterie musicale ».
Un vieil adage nous rappelle que la musique adoucit les mœurs, ce qui n’était pas forcément le cas entre les « Pompons Bleus » et les « Pompons Rouges » Tonneinquais.
Il ne faut pas oublier qu’en filagramme il y a cette rivalité de l’école libre et de l’école publique dont sont issues ces deux formations.
Loin de nous l’idée de raviver des tensions, nos propos se veulent un témoignage avec bien sûr sa vérité historique, certains vont en rire, d’autres grinceront peut-être les dents, quoi qu’il en soit ces échauffourées font parties de notre histoire.
Pour vous raconter cet épisode nous nous aidons du livre déjà cité « 1898-1998, Centenaire de l’Amicale Laïque », et nous en livrons quelques extraits :
« …Face aux curés, petits frères et bonnes sœurs, nos instituteurs étaient à la pointe du combat. Ils se battaient à force de travail et de dévouement. Nous les enfants de troupe, piétaille de la bonne cause, nous défendons nos idées et celles des autres à force de coups de poings et de cailloux comme on le verra que trop par ailleurs… ».
« … En face poussèrent les Pompons Rouges tout naturellement. Grâce à eux, nous pûmes répondre à l’aide de clairons laïques brillamment astiqués… ».
« … Dès lors pas une fête, pas un défilé, pas un rassemblement sans une menace de combat… On dut finalement diviser la ville en deux secteurs, chaque batterie entraînant derrière elle la troupe de ses partisans (les Pompons Rouges étaient accompagnés des Majorettes) … ».
« … Enfin nous nous retrouvions sur la place ou devant le monument aux morts… Entre les deux groupes, prudemment la maréchaussée… ».
« … Pour nous, nous nourrissions pour les élèves d’en face de solides inimitiés et ils nous le rendaient bien. Nous nous invectivions au passage.
Ils nous appelaient : laïcards et fils du diable et nous, de notre côté : calotins et ratapoils.
Nous en venions aux coups. Nos champs de bataille se situaient un peu partout, au hasard des circonstances, mais, de préférence, soit au jardin public, soit autour de l’octroi central… ».
« …Le jardin public nous offrait l’avantage de ses allées, bassins, massifs, fourrés beaucoup plus épais alors que de nos jours. Nous nous tendions des embuscades à la manière des Apaches et des Sioux.
Les coups pleuvaient et je me souviens de bosses sur le crâne, plaies, meurtrissures et déchirures vaillamment gagnées… ».
De nos jours il n’est pas rare de voir les deux harmonies « École Municipale de Musique » et les « Pompons Bleus » animer notamment les différentes cérémonies du souvenir.
A l’âge de 71 ans Élie passe le témoin en 1968 à André Piquemal, autre figure Tonneinquaise.